L’ARMÉNIE MENACÉE DE DISPARITION

L’Azerbaïdjan et la Turquie visent l’anéantissement du premier État chrétien du monde

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

3 octobre 2022

Dans la nuit du 12 au 13 septembre 2022, l’armée azerbaïdjanaise a lancé contre l’Arménie une attaque massive, appuyée par des forces d’infanterie, de l’artillerie lourde et des drones. Au cours de cette offensive, les troupes de Bakou ont commis de nombreuses atrocités, qu’elles ont filmées et répandues sur les réseaux sociaux.

L’Azerbaïdjan turcophone, pétrodictature dirigée par la famille Aliyev depuis 1993, bénéficie du soutien de la Turquie de Recep Tayyip Erdogan, alors que la Russie, malgré ses engagements officiels, reste très timide dans son soutien à l’Arménie. Pris en tenaille entre ces deux puissants voisins autoritaires et musulmans, l’Arménie démocratique, premier État chrétien au monde, voit désormais sa survie même plus que jamais menacée. La Suisse peut aider l’Arménie sur plusieurs fronts.

© Sources d’Arménie, 2022 (d’après plusieurs sources) La carte de ci-dessus montre comment l’Azerbaïdjan, allié de la Turquie, cherche à créer une continuité territoriale jusqu’à la frontière turque par l’occupation du sud et des zones orientales de l’Arménie

Cette attaque de l’Azerbaïdjan contre l’Arménie est la nouvelle étape d’une fatale danse macabre dont l’objectif géopolitique d’étendre ses frontières jusqu’à la Turquie. Un premier pas fut, en 2020, la conquête violente du Haut-Karabagh, terre arménienne en territoire azéri. Le deuxième serait l’annexion du Sud et de l’Est du territoire internationalement reconnu de l’Arménie. La conclusion de ce mouvement expansionniste des stratèges de Bakou serait une continuité territoriale avec le Nakhitchevan, enclave azérie limitrophe de l’Arménie et au-delà la Turquie (cf. carte).

Lors de cette offensive azérie, cinq femmes arméniennes (Anush Apétyan, Susanna Grigoryan, Alisa Melkonyan, Irina Gasparyan et Gayané Abgaryan) ont été violées et leurs corps démembrées par l’armée azérie, leur supplice filmé et largement diffusé sur les réseaux sociaux.

Quelques jours plus tard, lors de son voyage officiel à Érévan du 17 au 19 septembre 2022, Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants des États-Unis, déclarait: «Les fondateurs de notre État ont choisi la démocratie contre l’autoritarisme (…). De génération en génération, nous avons protégé et défendu ce choix. Aujourd’hui, des USA à l’Ukraine, à Taïwan et en Arménie, le monde fait face à un choix entre la démocratie et l’autoritarisme Nous devons une fois de plus choisir la démocratie.» Et aussi: «Nous condamnons fermement ces attaques, au nom du Congrès [américain], qui menacent la perspective d’un accord de paix (…).

Dans le même temps, Mustafa Destici, le leader du Parti islamiste et nationaliste turc de la Grande Union, affirmait, à l’adresse des Arméniens, le 18 septembre 2022: «Je vous rappelle que la nation turque a la capacité d’effacer l’Arménie de l’histoire et de la géographie et qu’elle est à la limite de sa patience».

L’Azerbaïdjan quant à lui n’a jamais recherché de paix négociée autour du conflit du Haut-Karabagh avec les Arméniens et n’a même jamais respecté aucun des cessez-le-feu convenus depuis 2000. Le régime dictatorial d’Ilham Aliyev n’a cessé en effet de mentir en renvoyant la responsabilité des échecs des négociations et des violations des cessez-le-feu sur d’autres, Arméniens ou médiateurs. Cela rappelle de façon sinistre les affirmations cyniques du gouvernement turc faites en 1915, selon qui il n’y avait pas de problème dans les provinces orientales de l’Empire ottoman, alors que les Turcs y massacraient dans le même temps un million et demi d’Arméniens. Aujourd’hui, c’est avec le même cynisme que l’on exige des Arméniens de «cesser les provocations».

Or, cette guerre contre l’Arménie est financée depuis la Suisse, en particulier grâce à l’achat de gaz et de pétrole azéris vendus par la SOCAR, la société nationale pétrolière et gazière du pays. La Suisse devrait exercer pleinement son rôle et son influence dans ce conflit en condamnant l’attaque de l’Azerbaïdjan contre l’Arménie, comme elle l’a fait lorsque la Russie a déclenché sa guerre contre l’Ukraine. Pourtant, Berne s’obstine à renvoyer dos à dos l’Azerbaïdjan et l’Arménie. Le Conseil fédéral, dans sa réponse récente à huit interventions parlementaires, appelle en effet «les parties à respecter le droit international, en particulier le droit humanitaire et les droits de l’homme, et à protéger la population civile et les personnes qui ne participent pas directement aux hostilités.» Le Conseil fédéral sait-il que c’est bien l’Arménie qui est la victime d’une attaque militaire dans ses régions orientales? Quelle est selon lui la différence entre cette invasion et celle de l’Ukraine du 24 février dernier, lorsque le Conseil fédéral n’a pas hésité à condamner clairement l’agresseur?

La Suisse peut aussi aider l’Arménie et lui témoigner sa solidarité en reconnaissant enfin le génocide de 1915, ce qu’a fait le Conseil national mais pas le Conseil des États, et freiner sur son sol l’activité de la SOCAR, qui utilise la Suisse comme plateforme pour financer la guerre contre l’Arménie.

Lâchée par la communauté internationale, l’Arménie, pays enclavé, fait face, seule, à deux armées puissantes et coordonnées, dont l’une est membre de l’OTAN, qui bénéficient de l’appui de milliers de combattants djihadistes. Cette nouvelle agression ne doit rien au hasard. Pour la Turquie et l’Azerbaïdjan, l’Arménie doit disparaître pour laisser la place à une nouvelle puissance panturque et islamiste, qui permettra à Erdogan et à ses successeurs à faire chanter l’Europe avec encore plus de
succès.

Si l’Europe et la Suisse restent indifférentes envers l’Arménie et continuent d’acheter du pétrole et du gaz à l’Azerbaïdjan, alors nous pourrions assister à l’achèvement de ce que la Turquie a commencé avec le génocide de 1915: l’extermination complète des Arméniens sur ce qui reste de leur patrie historique.

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